« Il est à l’arrière, il regarde en silence par la vitre les différentes nuances de vert qui dans la vitesse se mélangent, les arbres ont disparu, c’est un amas si on fixe un point au-delà; il a treize ans, très bientôt quatorze, cheveux bruns qui bouclent, peau mate, un peu bouffi. »
C’est ainsi que commence Les vacances du petit Renard, paru au Seuil, premier roman d’Arthur Cahn qui entraîne le lecteur dans un conte estivale qui suit Paul Renard, un adolescent gay qui s’éveille à la séduction et à la sexualité.
A l’aube de ses quatorze ans, le jeune homme part en vacances dans la maison de famille à la campagne. Là, il y a ses parents qui ne s’entendent plus, la sœur, qui est gentille, mais qui est petite, il y a Arnaud, le neveu du voisin …, il y a Béné, la tante un peu fofolle, et il y a surtout Hervé, un ami quadragénaire qui accompagne justement la tante pour les vacances. Le petit Paul en tombe amoureux. Premier crush pour ce jeune adolescent qui est pris entre l’enfance et l’âge adulte, entre Harry Potter et Xvideos, entre les dessins animés et Grindr.
C’est un ouvrage singulier qu’a publié en ce début d’année, le réalisateur, acteur et donc désormais auteur, Arthur Cahn. Celui qui maîtrise l’image et prépare son premier long métrage, propose donc ce qui pourrait ressembler à une fable, mais est plutôt un récit estivale contemporain du premier amour. Qui n’a jamais eu un coup de cœur jeune-adolescent pour un ami de sa sœur, un voisin, un ami de ses parents par exemple ? C’est ce qui arrive à Paul, notre jeune Renard. Pogné entre l’enfance et l’âge adulte, l’arrivée d’Hervé bouscule son été et le fait plonger dans l’apprentissage de la séduction et de la sexualité à l’heure du tout-numérique.
Lorsqu’il reçoit un téléphone intelligent pour ses 14 ans, il se connecte non sans appréhension à Grindr, il y découvre la déception, la surprise, la vulgarité, l’excitation aussi et au fil des photos, il y a Hervé. Une correspondance sous une fausse identité commence entre le jeune adolescent amoureux et l’homme qui ne se rend compte de rien.
Court et très contemporain, ce roman montre la transition de l’adolescence pour un jeune gay d’aujourd’hui. Le problème de l’utilisation de Grindr ou d’application de rencontre similaires, par des mineurs a été soulevé encore récemment. Ici, l’auteur ne juge pas, c’est juste un fait. Entre attraction et répulsion, Paul fait l’apprentissage d’une séduction détachée des émotions et sentiments dont pourtant il est emplis.
Ce roman a reçu le Prix du Roman Gay 2018 et est disponible aux bibliothèques de la ville de Québec.
Par Michel Hubert